“C’est en contemplant

le vieux visage d’hÉCUBE

QUE J’AI SU CE QU’ÉTAIT LE THÉÂTRE.”

Laurent GaudÉ

EN CRÉATION

ONYSOS LE FURIEUX

de Laurent Gaudé

Mise en scène : Maïlys Castets

Jeu, chants, danse : Yoann Fayolle, Cécile Peyrot, Laurence Roy, Nell Sin

ET UN CHŒUR DIONYSIAQUE

Tout commence par une voix.

Dans le métro new-yorkais. La voix d'un très vieil homme qui interpelle quelqu'un, une âme errante comme lui. Il l'interroge.

« Tu te demandes ce que je suis... »

Mais Onysos n'est pas, il est en devenir, prêt à renaître d'entre les ombres.

D'un seul souffle, il traverse des millénaires pour s'incarner dans ce conteur envoûtant qui toute la nuit, va nous chanter son histoire. Nous sommes dans les boyaux de cette cité cosmopolite et dantesque où la nature sauvage, sensuelle et indomptable de l'homme-dieu semble ici prendre toute sa mesure.

Le récit est à son image : fulgurant, violent, sulfureux. Et plus il parle, plus il rajeunit et retrouve sa puissance originelle.

« J’apprends à être furieux et insaisissable. Désormais je m’appelle Onysos et c’est ce nom que j’imposerai aux hommes. Je suis le lion chevelu des monts Zagros. Je suis né, mort né. Seul au milieu des fougères et des pierres, je prends des forces pour mes combats à venir. Seul dans la nuit mésopotamienne, je pousse mes premiers hurlements de jaguar qui font fuir les animaux et trembler les lèvres des femmes. »

Ce monologue est l'une des toutes premières œuvres de Laurent Gaudé. Son écriture semble sortie d'une nuit de fièvre et de fureur, où le désir sauvage jaillit de la parole comme un fauve excité par le musc et le sang.

L'écrivain aime s'inspirer des mythologies. Il puise ici sa source dans le mythe de Dionysos, l'un des dieux les plus célèbres de l'Antiquité gréco-romaine, et l'un des plus énigmatiques. On a coutume de considérer ses cérémonies archaïques, les bacchanales, comme les initiales du Théâtre rituel : premières « messes » ; premiers sabbats et carnavals ; premières catharsis aussi. Car les anciens connaissaient bien cette nécessité de libérer le souffle primaire, l'expression du corps, les forces instinctives habituellement refoulées par la tyrannie de la logique et de la raison. Dionysos est le dieu de la folie, de l’errance, du vin et du théâtre. Et en effet, le théâtre n'est-il pas justement ce lieu où l'invisible se donne à voir, et où l'instinct et le sensible reprennent enfin tous leurs droits ?

Mais l'auteur ne s'arrête pas là : en transportant le mythe au cœur de nos sociétés modernes, il provoque une confrontation aux résonances étourdissantes. Car Onysos ne fait pas partie des héros, des élus, des privilégiés. Il est au contraire le semeur du désordre et de la transe, l'exilé, le paria, la danseuse dangereuse et irrésistible. Les gueux, les faibles et les exclus constituent son armée vengeresse.

« De ces hommes et de ces femmes qui n'ont rien, je suis le témoin. Onysos est celui qui les aime.

Je n'ai ni or ni repos à leur offrir, juste le partage du regard émigré. »

Et c’est ici que le texte de Laurent Gaudé vient nous toucher au cœur. Son Onysos est le porte-parole de ceux que la communauté rejette. Il nous montre l'inégalité et l'exclusion comme les matrices d'un cercle vicieux inéluctable. L'homme face à ses peurs, face à sa propre monstruosité refoulée... L’homme qui, écœuré du combat, reconnaît enfin son éternelle défaite. Autant de thèmes sensibles qui réveillent les cruelles blessures de nos sociétés.

Parce qu'il est insaisissable, changeant, polymorphe, parce qu'il réside dans nos combles, nos bidonvilles, notre inconscient, parce qu'il sait employer tous les subterfuges pour nous charmer, notre Onysos sera triplement incarné - ou désincarné : à travers sa parole, ses danses, ses chants. Son odyssée sera portée par un trio de choryphées-bacchantes qui entraîneront New-York dans la ouate sulfureuse de la nuit mésopotamienne.

Pour reconnecter l’acte théâtral à cette dimension spirituelle et cathartique qu'il nous faut rechercher, nous avons dû exploser les conventions théâtrales pour retrouver une porosité fertile entre le spectateur et les artistes sur scène . Le public, proche des comédiens, sera installé de façon bifrontale. Loin de son habituelle passivité, il sera invité à chanter, participer, réagir ou même s'opposer parfois, constituant ainsi une formidable caisse de résonance à l’énergie déployée sur scène. Sur ce fil, nous avons conçu une large scénographie, ouverte et évocatrice. Inspirée du théâtre antique grec, son proscenium sera transformé en quai de métro, et ses deux portiques, constitués de tôles et de voiles, seront les entrées, changeantes et inquiétantes, des bas-fonds. Derrière eux, des tambours, des scies, des gongs sont prêts à résonner. Mais surtout, il y a l’espace circulaire central, autour duquel sont disposés les spectateurs. Au milieu de ce chœur, un monticule de terre est dressé, comme un dernier vestige de rituels oubliés.

A l’intérieur de ce dispositif immersif, tout le long du spectacle, des fresques fantasmagoriques viendront se déployer au rythme des chants polyphoniques entonnés par les bacchantes et le public. Les corps danseront, tantôt sculpturaux, tantôt évanescents, pour entrer dans cette vibration, cette résonance profonde entre la mémoire de nos racines, et la violence souterraine de nos sociétés.

QUELQUES EXTRAITS DE RÉPÉTITIONS DES CHANTS AVEC LE CHŒUR :

Onysos le furieux sera notre fête, notre cri, notre appel.

Mais surtout, une prière adressée à la fragilité.

« Je crois que c'est en contemplant le vieux visage d'Hécube que j'ai su ce qu'était le théâtre.

Au milieu des Troyens j'ai joué tour à tour Hécube la mère meurtrie,

Hector traîné dans la poussière,

Cassandre enchaînée,

J'ai joué pour eux et j'ai fait tous les rôles. »

QUELQUES EXTRAITS VIDÉOS de nos ÉTAPES DE CRÉATION :

dernière sortie de résidence

VENDREDI 1er MARS à 15h & 18h30

au Pôle Nord - Agence de Voyages Imaginaires

Gratuit sur réservation :


CRÉATION

SAMEDI 4 MAI - 20h30

DIMANCHE 5 MAI - 16h00

au Théâtre de Fontblanche - Vitrolles